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8) César traverse les Cévennes.

 

Livre VII : chapitre 8.

          Après avoir pris ces dispositions, comme déjà Luctérios arrêtait son mouvement et même reculait, parce qu’il trouvait dangereux de s’aventurer au milieu de nos détachements, César part chez les Helviens. Les Cévennes, qui forment barrière entre les Helviens et les Arvernes, étaient en cette saison, à l’époque la plus rude de l’année, couvertes d’une neige très haute qui interdisait le passage. Néanmoins, les soldats fendent et écartent la neige sur une profondeur de six pieds et, le chemin ainsi frayé au prix des plus grandes fatigues pour les hommes. On débouche dans le pays des Arvernes. 

            Cette arrivée inattendue les frappe de stupeur, car ils se croyaient protégés par les Cévennes comme par un rempart et jamais, à cette époque de l’année, on n’avait vu personne, fût-ce un voyageur isolé, pouvoir en pratiquer les sentiers. Alors César ordonne à ses cavaliers de rayonner le plus loin possible en terrorisant l’ennemi le plus qu’ils peuvent. Rapidement, par la rumeur publique, par des messagers, Vercingétorix apprend ce qui se passe. Tous les Arvernes, au comble de l’émotion, l’entourent, le pressent qu’il pense à défendre leurs biens, qu’il ne laisse pas l’ennemi les piller entièrement, surtout quand – il le voyait bien – tout le poids de la guerre était pour eux. Cédant à leurs prières, il lève le camp et quitte le pays des Bituriges pour se rendre chez les Arvernes. 

Points clés du chapitre.

 

NB : C’est une diversion, pas une attaque.

  1. Le calme est revenu autour de la Narbonnaise. Le dispositif de défense installé par César a été efficace, car Luctérios recule.
  2. Rassuré, César part chez les Helviens (Vivarais), où ses légions ont été envoyées (chapitre 7) : César ordonne qu’une partie des troupes de la province et les renforts qu’il a amenés d’Italie se concentrent chez les Helviens, qui touchent aux Arvernes.
  3. César va traverser les Cévennes au plus fort de l’hiver. Nous sommes donc fin décembre 53 av. J.-C., certainement au moment du solstice, lors d’un hiver cévenol particulièrement rude. Il lui faut franchir des congères de 1,80 m. S’il a choisi cette période enneigée, c’est pour éviter que les Gaulois ne soient avertis de son arrivée par leur système de communication, qu’il a déjà jugé « très efficace ». Au chapitre 3, il écrit : Ce qui s’était passé à Cenabum au lever du jour fut connu avant la fin de la première veille chez les Arvernes, à une distance d’environ cent soixante milles.
  4. En passant un col des Cévennes (mais lequel ?), César débouche chez les Arvernes, donc chez les Vellaves À aucun moment de ce chapitre, César ne mentionne Gergovie ni aucune autre cité arverne. En plein hiver, les Gaulois sont surpris par cette expédition, qui sera sanglante en réponse aux massacres perpétrés par les Romains à Cenabum (Orléans).
  5. Le camp de César ne doit pas être très éloigné de la frontière entre les Helviens et les Arvernes. Dans le chapitre 8, il écrit : César débouche dans le pays des Arvernes, puis, au chapitre 9 : Mais César ne resta que deux jours sur place. César ordonne à sa cavalerie de massacrer le plus grand nombre d’Arvernes possible depuis son camp de base. L’infanterie, moins mobile, reste en défense et n’est pas sollicitée pour cette guérilla.
  6. Les Gaulois sont pris au dépourvu par cette incursion. Cependant, ce n’est que par des moyens peu honorables que César apprend, grâce à quelques prisonniers, que Vercingétorix se trouve à Avaricum (Bourges). Mais comment des Gaulois vivant près des Cévennes auraient-ils pu être informés de la présence de Vercingétorix à Avaricum, situé à 400 km ? Un début de réponse apparaît au chapitre suivant.
  7. Le but de ces massacres est d’attirer Vercingétorix.
  8. Vercingétorix quitte alors le pays des Bituriges pour se rendre là où César massacre les Arvernes, c’est-à-dire à proximité de cette frontière Helviens/Arvernes. Pour le moment, il est impossible de connaître précisément son itinéraire sur un axe nord-sud le long de la crête des Cévennes.
  9. Cette information sur le retour de Vercingétorix depuis Avaricum (Bourges) n’a pu parvenir à César que par Brutus. En effet, César traverse les Cévennes, débouche chez les Arvernes et, au chapitre 9, il est écrit : Mais César ne resta que deux jours sur place. En seulement deux jours, il est impossible que la nouvelle des massacres soit parvenue à Vercingétorix et que César ait appris son retour. Il est donc très probable que ce soit le Jeune Brutus, resté sur place, qui ait informé César. En effet, au chapitre 9, on lit : Mais César ne resta que deux jours sur place, puis : César quitte l’armée, laissant le commandement des troupes au jeune Brutus et César se dirige à marches forcées vers Vienne. Brutus est donc chargé de poursuivre cette guérilla après le départ de César.

 Les Cévennes.

 Chaine de montagne entre Narbonne et Vienne.

            Aujourd’hui, le nom « Cévennes » désigne une région principalement située dans le département du Gard. Mais en était-il de même à l’époque de Jules César ? Pour le vérifier, nous allons nous appuyer sur des sources contemporaines de son époque, ainsi que sur des indices toponymiques qui confirment ces informations venues d’un autre âge.

Strabon, Livre IV, chapitre 1 :
« Quant aux monts Cemmènes, ils s’avancent perpendiculairement aux Pyrénées, à travers les plaines de la Gaule, et viennent s’arrêter juste au centre du pays, c’est-à-dire dans les environs de Lugdunum, après un parcours de 2 000 stades environ. »

Cette mesure de : 2 000 stades est approximative. Un stade mesurant 184 mètres, on obtient :
2 000 stades × 184 m = 368 km.

            Sur Géoportail, la distance entre Narbonne et Vienne est d’environ 388 km en mode vélo, un itinéraire évitant les autoroutes et suivant les plaines de la Gaule. Si Strabon faisait référence à cette distance entre ces deux villes, la précision de sa mesure est remarquable.

À l’origine, le terme – Cévennes – désignait toute la bordure sud-ouest, sud, sud-est et est du Massif central. Ainsi, dans son acception la plus large, ce nom englobait de nombreux massifs de faible ou moyenne altitude :

  • Au sud, la montagne Noire (Aude), les monts de l’Espinouse et du Caroux (parc du Haut-Languedoc) prolongent les Petites Cévennes, qui s’étendent en contrebas du causse du Larzac (l’un des Grands Causses).
  • Plus au nord et à l’est, on trouve le pic Saint-Guiral, la montagne du Lingas, le massif de l’Aigoual, les étroites vallées des Gardons et la montagne du Bougès.
  • Encore plus au nord, le mont Lozère (Lozère) et le Tanargue (Ardèche) bordent la vallée du Rhône à l’est, avant de laisser place au massif du Pilat à l’extrémité nord-est.

Ce qu’il faut retenir dans ce chapitre N°8.

Le compte rendu de ce chapitre 8 sera plus long que le chapitre lui-même, mais chaque détail est important et doit être analysé précisément. Souvent la compréhension d’une phrase ou d’un mot  trouve son explication dans les chapitres suivants ou précédents.

 

  1. “Le calme est revenu autour de la Narbonnaise. Le dispositif de défense installé par César a été efficace car Luctérios recule.
  2. César est rassuré, il part chez les Helviens (Vivarais) où ses légions ont été envoyés. (Chapitre N°7) “César ordonne qu’une partie des troupes de la province et les renforts qu’il a amenés d’Italie se concentrent chez les Helviens, qui touchent aux Arvernes.”
  3. César va traverser les Cévennes au plus fort de l’hiver. Nous devons donc être fin décembre -53, certainement au moment du solstice d’un hiver très rude. Il faut passer des congères de 1,8m (6 pieds). S’il a choisi cette période enneigée, c’est pour éviter que les Gaulois ne soit prévenus de son arrivée grâce à leur système de communication qu’il a déjà estimé “être très efficace” au chapitre N°3 il écrit que : « ce qui s’était passé à Cenabum au lever du jour fut connu avant la fin de la première veille chez les Arvernes, à une distance d’environ cent soixante milles » environ 300 km en 50 h. ⇒ 6 km par heure jour et nuit.
  4. En passant un col des Cévennes, mais lequel ? César débouche chez les Arvernes. En aucun moment de ce chapitre il ne parle de Gergovie ni d’aucune autre cité des Arvernes. Pourtant César n’a pas fait faire cet effort surhumain à ses troupes pour attaquer des campagnes désertiques. Les Arvernes sont surpris par cette expédition qui se révèlera punitive en conséquence des massacres des Romains à Cenabum (chapitre 3).
  5. Le camp de césar ne doit pas être très loin de la limite Helviens / Arvernes. – Chapitre 8, il écrit « César débouche dans le pays des Arvernes ». – Chapitre 9, il écrit : « Mais César ne resta que deux jours sur place » César demande à sa cavalerie de massacrer des Arvernes le plus possible et le plus loin possible à partir de son camp de base. L’infanterie n’est pas impliquée dans ces massacres, elle a dû être stationnée dans un camp de base derrière cette frontière Helviens / Arvernes délimitée par la ligne de partage des eaux : Méditerranée / océan.
  6. Les Gaulois sont surpris par cette incursion. Cependant, ce n’est que par des moyens pas très louables que César a dû apprendre par quelques prisonniers que Vercingétorix est à Avaricum (Bourges). Comment est-ce que des Gaulois habitants près des Cévennes aient pu être au courant que Vercingétorix était à Avaricum ? (400km). Un début de réponse au chapitre suivant.
  7. Le but de ces massacres est d’attirer Vercingétorix là où César génocide la population Arverne.
  8. Vercingétorix quitte le pays des Bituriges pour se rendre là où César massacre des Arvernes : c’est à dire proche de cette frontière Helviens / Arvernes sans que pour le moment on ne puisse connaitre l’endroit précis de son passage sur un axe Nord / Sud de la crête des Cévennes.
  9. Cette information sur le retour d’Avaricum de Vercingétorix  (Bourges) n’a pu être rapportée à César que par Brutus. En effet, César traverse les Cévennes débouche chez les Arvernes et au chapitre 9, il est écrit : « Mais César ne resta que deux jours sur place ». En seulement deux jours, il est impossible que la nouvelle des massacres près des Cévennes arrive aux oreilles de Vercingétorix et que l’information de son retour revienne à celles de César. C’est certainement le jeune Brutus resté sur place qui a informé César car : (chapitre 9). « Mais César ne resta que deux jours sur place »,  “César quitte l’armée, laissant le commandement des troupes au jeune Brutus” « César se dirige à marches forcées vers Vienne ». C’est donc Brutus qui va devoir continuer cette guérilla après le départ de César.

La ligne de partage des eaux commence au nord, depuis le Pilat, puis se prolonge par le Meygal, le Mézenc et l’Aigoual. Elle est grossièrement représentée par une ligne en pointillés rouges.

            À l’époque de Strabon et de César, le terme : Cévennes, désignait la partie correspondant au bassin versant du Rhône. Aujourd’hui encore, la ligne de partage des eaux marque la frontière des Cévennes.

Ci dessous, à gauche, un document  ancien (diaporama) choisi parmis des dizaines d’autres confirme que le Pilat était dans les Cévennes. image de droite parle de Riotord, un village cévenol, voisin du Pilat, à l’extrème nord-est de la Haute-Loire.

Trésor de Lapte-en-Velay

Trésor de Lapte en Velay
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